Présentation

FRANCE • NÉ EN 1945

COULEURS FRESSON


On ne présente plus Bernard Plossu, voyageur-migrateur comme il se nomme lui-même, lui qui arpente le monde depuis des années, saisissant à travers son objectif des instants furtifs dans le Chiapas mexicain, l’Ouest américain, le désert du Niger, les villages du Maroc ou les côtes bretonnes. Il est devenu célèbre pour ses noir et blanc irisés de gris. Trop souvent comparé à Robert Frank ou à Édouard Boubat, qu’il admire pourtant, son style est singulier, d’une immense sensibilité. Son regard est aussi vif que sa mémoire.

Quand on arrive chez lui à La Ciotat, il rit de cette sédentarité qui l’attache à cette bâtisse, lui qui a toujours cherché dans les voyages le propre sens de sa vie. Avec son allure de jeune homme, son sourire tendre, il nous fait visiter sa maison des souvenirs, où, du sol au plafond, sont empilés pêle-mêle des boîtes de négatifs, des tirages de tous acabits, des ouvrages anciens, des dessins donnés par ses amis peintres, des objets dénichés au cours de soixante années de déambulations. « C’est un désordre organisé » précise-t-il, « je suis le seul à pouvoir retrouver mes petits ». Il voulait nous montrer une photographie prise au Mexique en 1965. « C’est un tableau ! », nous sommes-nous exclamés. Un compliment malheureux. C’est exactement ce qu’il ne faut pas lui dire, même s’il avoue ses affinités avec Corot pour ses lumières, Courbet pour ses paysages, Malevitch pour ses formes géométriques, Hopper pour ses formes abstraites.

Dès ses premiers clichés, Bernard Plossu a inventé une grammaire visuelle où se côtoient la subjectivité, la simplicité, le sensoriel et une rigueur de composition. Et ce sont ses photographies en couleur, moins reconnues, que nous avons souhaité mettre en lumière, avec ces tirages Fresson précisément. La texture particulière et le rendu très subtil de ce procédé pigmentaire, inventé au XIXe siècle par la famille du même nom basée à Savigny-sur-Orge, répondent à merveille à la focale sans esbroufe du photographe, soucieux de mettre à distance le spectaculaire et le grandiloquent. Se dévoilent alors des images de poésie, de celle qui fait entendre le frémissement du monde et de ses formes. Avec ce rendu poudré, légèrement charbonneux, qui confère aux paysages un aspect irréel.
 

RUE SAINT-VINCENT
 



Exposition réalisée en collaboration avec la galerie Camera Obscura à Paris.

Remerciements à Didier Brousse et César Champetier.
© Bernard Plossu • Exposition Couleurs Fresson