Presentation

Figure de la photo de mode dans les années 50, mais aussi photojournaliste de renom, Frank Horvat a travaillé pour des magazines tels que Life ou encore Vogue.

Dans les années 1980, il publie Entrevues,un recueil de ses entretiens avec des grands noms comme Doisneau, Koudelka ou encore McCullin et Newton.

Mon dernier projet photographique porte le nom de notre maison en Provence, qui est aussi le nom de ma compagne.(En écrivant “le dernier”, je me demande si ce mot veut seulement dire “le plus récent”, ou aussi “celui qui ne sera pas suivi par d’autres”).

Presque toutes les photos ont été faites entre octobre 2002 et septembre 2003, à l’intérieur de la maison ou dans un rayon de 50 mètres autour d’elle. Il me semble intéressant de mentionner qu’au cours de cette période je travaillais à la re-écriture du texte et à la sélection des photos de Time Machine, le compte-rendu d’un voyage autour du monde, fait en 1962 et 1963, et qu’inévitablement le va-et-vient entre les deux séries m’amenait à comparer ma mobilité et mes horizons du présent à ceux de jadis. Les deux projets diffèrent sous bien des rapports, au point qu’un spectateur non averti ne les attribuerait peut-être pas au même auteur : les photos de Time Machine sont en noir et blanc, et destinées à faire partager mes découvertes de voyageur à des lecteurs de magazines, alors que celles de La Véronique sont en couleurs et faites dans le seul but de témoigner d’un lieu, d’un moment ou d’une lumière qui me semblaient précieux.(Pour les férus de technologie, je mentionnerais que ce dernier travail a été réalisé avec un appareil numérique, qui m’a permis de saisir des écarts de lumière et d’ombre auxquels j’avais toujours été sensible, mais que les procédés traditionnels ne permettaient pas de rendre.) 

A vrai dire, la limite des cinquante mètres ne venait pas tant d’une difficulté de déplacement - et moins encore de quelque parti pris conceptuel - que du constat que le sentiment, qui me poussait à regarder et à déclencher, paraissait diminuer au fur et à mesure que je m’éloignais de La Véronique. 

Comme la fois, en février 2003, où le gel avait détruit presque toute la floraison de nos amandiers. J’avais bien repéré un arbre, à quelques kilomètres de chez nous, qui en avait été épargné et dont les fleurs restaient magnifiques, mais j’ai renoncé à le photographier, en me disant que mon sentiment, pour cet arbre-là, n’aurait pas été le même. 

En somme, alors que mon intention de jadis était de montrer des lieux ou des personnes qui me semblaient signifiants(ou des relations entre ces sujets), le propos de La Véronique est de laisser une trace de ma propre sensibilité. Ce qui n’empêchera pas le spectateur - du moins je le souhaite - d’y associer ses souvenirs et ses références.

Frank Horvat

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